La frontière entre sous-traitance et salariat est devenue particulièrement poreuse dans un contexte économique favorisant l’externalisation des activités. Cette zone grise du droit suscite un contentieux nourri devant les juridictions prud’homales et sociales. L’action en requalification constitue le levier juridique permettant de transformer une relation commerciale apparente en véritable relation de travail, avec toutes les conséquences qui en découlent. Les entreprises donneuses d’ordre se trouvent exposées à des risques juridiques majeurs, tandis que les travailleurs indépendants peuvent y voir un moyen de sécuriser leur statut. Cette problématique, au carrefour du droit du travail, du droit commercial et du droit de la sécurité sociale, nécessite une analyse approfondie de ses fondements, de sa mise en œuvre et de ses implications pratiques.
Les fondements juridiques de l’action en requalification
L’action en requalification repose sur un socle juridique solide, construit autour du principe fondamental selon lequel la qualification donnée par les parties à leur relation ne lie pas le juge. Ce principe, consacré par la jurisprudence de la Cour de cassation, permet au magistrat de restituer sa véritable nature juridique à une relation contractuelle, au-delà des apparences ou des dénominations choisies par les cocontractants.
Le Code du travail ne définit pas expressément le contrat de travail, mais la jurisprudence a dégagé ses éléments constitutifs. L’article L.8221-6 du Code du travail prévoit une présomption simple de non-salariat pour les personnes immatriculées au registre du commerce ou des métiers. Toutefois, cette présomption peut être renversée lorsqu’il est établi que ces personnes fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard du donneur d’ordre.
La subordination juridique, critère déterminant du contrat de travail, a été définie par l’arrêt de principe Société Générale du 13 novembre 1996 comme « l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ». Cette définition a été affinée et complétée par la jurisprudence ultérieure.
Au niveau européen, la Cour de Justice de l’Union Européenne a développé une approche similaire, notamment dans l’arrêt Lawrie-Blum de 1986, définissant le travailleur comme celui qui accomplit, pendant un certain temps, en faveur d’une autre personne et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles il perçoit une rémunération.
L’évolution de la notion de subordination
La notion de subordination a connu une évolution significative avec l’émergence de nouvelles formes de travail. La Chambre sociale a ainsi développé la théorie du faisceau d’indices pour caractériser le lien de subordination. Parmi ces indices figurent:
- L’intégration à un service organisé par autrui
- Le respect d’horaires imposés
- La fourniture des moyens de travail
- L’absence d’autonomie dans l’organisation du travail
- Le contrôle régulier de l’activité
- Le pouvoir disciplinaire
Cette approche pragmatique permet d’appréhender des situations complexes où la subordination peut être diluée ou masquée. L’arrêt Take Eat Easy du 28 novembre 2018 illustre cette évolution en reconnaissant qu’un système de géolocalisation et un pouvoir de sanction peuvent caractériser un lien de subordination dans l’économie des plateformes.
Les indices de requalification et la méthode du faisceau d’indices
Face à la diversité des situations, les tribunaux ont développé une méthode d’analyse fondée sur un faisceau d’indices permettant de déterminer la nature véritable de la relation contractuelle. Cette approche globale examine l’ensemble des circonstances dans lesquelles s’exerce l’activité professionnelle.
Le premier groupe d’indices concerne les conditions d’exécution du travail. La Cour de cassation s’attache particulièrement à vérifier si le prestataire dispose réellement d’une autonomie dans l’organisation de son activité. L’imposition d’horaires, de lieux de travail, de méthodes ou de procédures spécifiques constitue un indice fort de subordination. Dans un arrêt du 13 février 2020, la Chambre sociale a ainsi relevé que des chauffeurs livreurs étaient soumis à des horaires précis et à des itinéraires déterminés par leur donneur d’ordre, justifiant la requalification.
Le second groupe d’indices s’intéresse aux moyens matériels. Lorsque le donneur d’ordre fournit les outils, équipements, matériaux ou locaux nécessaires à l’exécution de la prestation, cela peut révéler une dépendance économique incompatible avec un véritable statut d’indépendant. La jurisprudence considère notamment que l’utilisation exclusive des outils informatiques, logiciels ou véhicules appartenant au donneur d’ordre constitue un indice significatif.
Le troisième groupe d’indices porte sur le contrôle exercé par le donneur d’ordre. L’existence d’un pouvoir de direction, de surveillance et de sanction représente le cœur du lien de subordination. Les juges examinent si le donneur d’ordre peut donner des instructions précises, vérifier leur bonne exécution et sanctionner les manquements. Les systèmes de notation, d’évaluation ou de contrôle qualité sont particulièrement scrutés.
Les indices spécifiques à certains secteurs d’activité
Certains secteurs présentent des particularités qui influencent l’appréciation du lien de subordination:
- Dans le transport: l’exclusivité, l’obligation de porter un uniforme, le respect d’un planning imposé
- Dans l’informatique: l’intégration aux équipes du client, le reporting régulier, l’utilisation des méthodes du client
- Dans les professions intellectuelles: la dépendance technique, l’absence de clientèle propre
L’appréciation du juge reste souveraine et contextuelle. Un même indice peut avoir une portée différente selon le secteur d’activité ou les pratiques habituelles de la profession. Dans un arrêt du 22 janvier 2020, la Cour de cassation a ainsi considéré que le fait pour un architecte de travailler exclusivement pour un cabinet d’architecture ne suffisait pas à caractériser un lien de subordination, compte tenu des spécificités de cette profession.
La méthode du faisceau d’indices permet ainsi une analyse nuancée des situations, au-delà des apparences formelles créées par les parties. Elle constitue un outil efficace pour détecter les situations de salariat déguisé, tout en préservant les formes légitimes de sous-traitance.
La procédure d’action en requalification et ses aspects pratiques
L’action en requalification d’une relation de sous-traitance en contrat de travail obéit à des règles procédurales spécifiques que les praticiens doivent maîtriser pour maximiser les chances de succès ou, à l’inverse, pour organiser efficacement la défense du donneur d’ordre.
La compétence juridictionnelle constitue le premier point d’attention. Le Conseil de prud’hommes est compétent pour connaître des litiges relatifs à la requalification, conformément à l’article L.1411-1 du Code du travail. Cette compétence s’étend même aux situations où l’existence d’un contrat de travail est précisément l’objet du litige, comme l’a confirmé la Cour de cassation dans un arrêt du 15 mars 2017. Le demandeur doit saisir le conseil de prud’hommes dans le ressort duquel se trouve l’établissement où le travail est effectué. En cas de travail à domicile ou en dehors de tout établissement, la juridiction compétente est celle du domicile du demandeur.
Concernant la prescription, l’action en requalification est soumise à la prescription triennale prévue par l’article L.1471-1 du Code du travail. Ce délai court à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit. Dans le cas particulier du travail dissimulé, l’article L.8223-2 du Code du travail prévoit une prescription de cinq ans.
L’élaboration du dossier de preuve représente l’enjeu central de la procédure. La charge de la preuve incombe principalement au demandeur, qui doit réunir suffisamment d’éléments pour établir l’existence d’un lien de subordination juridique. Les documents contractuels (contrats de prestation, bons de commande, factures) constituent un point de départ, mais ils doivent être complétés par des preuves démontrant la réalité de l’exécution du travail: correspondances électroniques, témoignages, plannings, rapports d’activité, badges d’accès, etc.
Les mesures d’instruction
Le juge prud’homal dispose de pouvoirs d’instruction étendus qu’il peut mettre en œuvre pour établir la réalité des faits:
- L’audition de témoins
- La production forcée de documents
- La désignation d’un conseiller rapporteur
- L’expertise technique
En pratique, les avocats spécialisés recommandent de constituer progressivement un dossier probatoire pendant l’exécution de la relation contractuelle, en conservant tous les éléments susceptibles de démontrer l’existence d’un lien de subordination: mails donnant des instructions précises, convocations à des réunions obligatoires, évaluations, réprimandes, etc.
La procédure peut également impliquer des tiers, notamment l’URSSAF qui peut intervenir volontairement à l’instance ou être appelée en intervention forcée. L’inspecteur du travail peut dresser un procès-verbal pour travail dissimulé, qui constituera un élément de preuve précieux. Dans certains cas, le Procureur de la République peut engager des poursuites pénales parallèlement à l’action civile.
Une stratégie procédurale efficace doit tenir compte des spécificités de la juridiction saisie et s’adapter au profil du dossier. Pour le demandeur, il peut être judicieux de solliciter des mesures provisoires, comme le versement de provisions sur salaires. Pour le défendeur, la contestation de la compétence ou la mise en avant d’une prescription peuvent constituer des moyens de défense préliminaires pertinents.
Les conséquences juridiques et financières de la requalification
La décision judiciaire de requalifier une relation de sous-traitance en contrat de travail entraîne des conséquences juridiques et financières considérables, tant pour le donneur d’ordre requalifié en employeur que pour le sous-traitant requalifié en salarié.
Sur le plan contractuel, la requalification opère rétroactivement au premier jour de la relation. Le contrat de travail est réputé avoir existé dès l’origine, ce qui implique l’application de l’ensemble des dispositions du Code du travail, des conventions collectives et des accords d’entreprise. La nature du contrat est généralement celle d’un contrat à durée indéterminée, sauf si les conditions d’un contrat à durée déterminée sont réunies et formalisées.
Les conséquences financières sont particulièrement lourdes pour l’employeur requalifié. Celui-ci doit régulariser la situation salariale du travailleur sur toute la période non prescrite, ce qui comprend:
- Le paiement des salaires selon la grille conventionnelle applicable
- Les primes et indemnités conventionnelles
- Les congés payés (10% des rémunérations brutes)
- Les heures supplémentaires et leurs majorations
- La participation et l’intéressement
En matière de sécurité sociale, l’employeur doit régulariser les cotisations sociales auprès de l’URSSAF, avec application de majorations de retard. Cette régularisation s’accompagne souvent d’un redressement fiscal, les sommes versées au titre du contrat commercial étant requalifiées en salaires. Dans l’arrêt du 7 juillet 2016, la Chambre sociale a précisé que les sommes déjà versées au titre du contrat commercial s’imputent sur les rappels de salaire dus au titre de la requalification, évitant ainsi une double rémunération pour la même prestation.
Pour le travailleur requalifié, les conséquences sont généralement favorables. Il bénéficie de la protection du droit du travail, notamment contre le licenciement abusif. Si la relation a pris fin, la rupture est analysée comme un licenciement dont il faut vérifier la cause réelle et sérieuse. En l’absence de procédure régulière ou de motif valable, le salarié peut prétendre à diverses indemnités:
- L’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement
- L’indemnité compensatrice de préavis
- L’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- Des dommages-intérêts pour licenciement irrégulier
Les sanctions spécifiques du travail dissimulé
Lorsque la requalification s’accompagne d’une caractérisation de travail dissimulé, défini par l’article L.8221-5 du Code du travail, des sanctions supplémentaires s’appliquent:
L’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, égale à six mois de salaire (article L.8223-1 du Code du travail), constitue une sanction civile automatique. Cette indemnité se cumule avec les autres indemnités de rupture. Dans un arrêt du 15 mars 2018, la Cour de cassation a confirmé que cette indemnité était due même en l’absence d’intention frauduleuse de l’employeur.
Les sanctions pénales peuvent atteindre trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende pour les personnes physiques, montant quintuplé pour les personnes morales. Des peines complémentaires peuvent être prononcées, comme l’interdiction d’exercer l’activité professionnelle ou l’exclusion des marchés publics.
Les sanctions administratives incluent le refus d’aides publiques à l’emploi pendant cinq ans et la publication de la condamnation sur une liste noire. L’article L.8222-2 du Code du travail prévoit en outre une solidarité financière du donneur d’ordre avec son sous-traitant pour le paiement des impôts, taxes et cotisations sociales.
Ces conséquences multidimensionnelles expliquent pourquoi les entreprises cherchent à sécuriser leurs pratiques de sous-traitance et pourquoi les travailleurs indépendants économiquement dépendants peuvent trouver un intérêt à agir en requalification.
Stratégies préventives et défensives face au risque de requalification
Face aux risques juridiques et financiers considérables que représente la requalification, les entreprises ont tout intérêt à mettre en place des stratégies préventives efficaces et, le cas échéant, à organiser leur défense de manière pertinente.
La première ligne de défense consiste à structurer correctement la relation de sous-traitance dès son origine. Le contrat commercial doit être soigneusement rédigé pour éviter toute ambiguïté sur la nature de la relation. Il convient notamment d’y inclure:
- Une définition précise de la mission en termes de résultats attendus plutôt que de moyens
- L’affirmation claire de l’indépendance technique et organisationnelle du prestataire
- L’absence d’exclusivité ou, si elle est nécessaire, sa justification économique
- La responsabilité du prestataire quant aux moyens mis en œuvre
- Des modalités de rémunération liées au résultat et non au temps passé
Au-delà du contrat, c’est la réalité de l’exécution qui primera aux yeux du juge. Les entreprises doivent donc veiller à ce que leurs pratiques quotidiennes respectent l’autonomie du sous-traitant. Cela implique de former les managers et les équipes opérationnelles aux bonnes pratiques: ne pas intégrer le sous-traitant dans l’organigramme, éviter de lui donner des instructions directes sur la manière d’exécuter sa mission, ne pas le soumettre aux mêmes règles que les salariés en matière d’horaires ou de reporting.
La diversification du portefeuille clients du sous-traitant constitue un élément important. Un prestataire qui travaille exclusivement pour un seul donneur d’ordre pendant une longue période se trouve dans une situation de dépendance économique qui peut être interprétée comme un indice de salariat déguisé. Les entreprises peuvent encourager leurs sous-traitants à développer une clientèle diversifiée, voire les y aider en limitant volontairement le volume d’affaires réalisé avec eux.
La défense en cas de contentieux
Si malgré ces précautions, une action en requalification est engagée, plusieurs lignes de défense peuvent être mobilisées:
L’absence de subordination juridique demeure l’argument central. L’entreprise doit démontrer que le prestataire conservait son autonomie dans l’organisation de son travail. Les éléments matériels jouent un rôle déterminant: correspondances professionnelles, témoignages de clients ou collaborateurs, documents attestant d’initiatives prises par le prestataire sans validation préalable.
La réalité entrepreneuriale du prestataire constitue un argument complémentaire puissant. Un sous-traitant qui dispose de sa propre clientèle, qui emploie lui-même du personnel, qui investit dans des équipements professionnels ou qui assume des risques commerciaux présente les caractéristiques d’un véritable entrepreneur indépendant. Dans un arrêt du 18 janvier 2018, la Cour de cassation a ainsi refusé la requalification en relevant que le prestataire avait créé une SARL unipersonnelle, employait trois salariés et intervenait pour plusieurs clients.
La spécificité de certains secteurs d’activité peut également être invoquée. Dans les domaines hautement techniques ou réglementés, certaines contraintes (respect de normes, coordination nécessaire, impératifs de sécurité) peuvent justifier un encadrement qui ne traduit pas nécessairement un lien de subordination. La jurisprudence reconnaît ces particularités, notamment dans le secteur médical, informatique ou aéronautique.
Enfin, les entreprises peuvent soulever des moyens procéduraux comme la prescription ou l’incompétence de la juridiction saisie. Si ces moyens ne garantissent pas une victoire sur le fond, ils peuvent néanmoins permettre de gagner du temps ou d’obtenir l’irrecevabilité de certaines demandes.
Une stratégie de défense efficace combine généralement ces différents arguments et s’appuie sur une documentation solide rassemblée tout au long de la relation commerciale. La préparation en amont du contentieux s’avère souvent déterminante dans l’issue du litige.
Perspectives d’évolution et nouvelles formes de travail
Le cadre juridique de la requalification se trouve aujourd’hui confronté à l’émergence de nouvelles formes de travail qui brouillent les frontières traditionnelles entre salariat et indépendance. Ces évolutions appellent une réflexion sur l’adaptation du droit aux réalités économiques contemporaines.
L’économie des plateformes numériques constitue le défi le plus visible. Ces intermédiaires technologiques mettent en relation des prestataires indépendants avec des clients, tout en exerçant un contrôle algorithmique sur les conditions d’exécution du service. La jurisprudence a commencé à appréhender ce phénomène avec des décisions marquantes comme l’arrêt Take Eat Easy de 2018, qui a reconnu l’existence d’un lien de subordination entre une plateforme de livraison et ses coursiers. L’arrêt Uber du 4 mars 2020 a confirmé cette tendance en requalifiant un chauffeur VTC en salarié.
Face à ces évolutions jurisprudentielles, le législateur a tenté d’apporter des réponses spécifiques. La loi Orientation des mobilités du 24 décembre 2019 a ainsi créé des chartes sociales facultatives pour les plateformes, sans toutefois résoudre la question fondamentale de la qualification juridique de la relation. Au niveau européen, la proposition de directive sur les travailleurs des plateformes présentée en décembre 2021 instaure une présomption de salariat lorsque certains critères de contrôle sont réunis.
Au-delà des plateformes, d’autres formes de travail hybrides se développent: portage salarial, coopératives d’activité et d’emploi, entreprises de travail à temps partagé. Ces dispositifs tentent de combiner sécurité juridique et autonomie professionnelle. La loi Madelin de 1994, modifiée par la loi du 4 août 2008, a instauré une présomption de non-salariat pour les travailleurs indépendants immatriculés, mais cette présomption reste réfragable comme l’a rappelé la Cour de cassation dans plusieurs arrêts récents.
Vers un statut intermédiaire?
Face aux limites de la dichotomie traditionnelle entre salariat et indépendance, certains systèmes juridiques étrangers ont développé des catégories intermédiaires:
- Le worker britannique, qui bénéficie de certains droits sociaux sans être pleinement salarié
- Le parasubordinato italien, qui désigne un travailleur autonome économiquement dépendant
- Le TRADE espagnol (travailleur autonome économiquement dépendant), qui doit réaliser au moins 75% de son activité pour un même donneur d’ordre
En France, la création d’un tel statut intermédiaire fait l’objet de débats récurrents. Ses partisans y voient une solution pragmatique aux situations ambiguës, tandis que ses détracteurs craignent une fragilisation du statut salarial et une complexification du droit. Le Conseil d’État, dans une étude publiée en juillet 2019, a recommandé de ne pas créer de troisième statut mais plutôt d’adapter les protections existantes.
L’enjeu fondamental demeure la protection sociale des travailleurs, quelle que soit la forme juridique de leur activité. La protection sociale des indépendants s’est progressivement rapprochée de celle des salariés, avec notamment la création du régime des auto-entrepreneurs en 2009 et l’intégration du RSI au régime général en 2018. Cette convergence pourrait se poursuivre, rendant moins cruciale la question de la qualification.
La numérisation du travail, l’aspiration à l’autonomie et la recherche de flexibilité continueront de transformer les relations de travail. Le droit devra évoluer pour offrir un cadre adapté à ces mutations, tout en préservant l’équilibre entre liberté contractuelle et protection des parties vulnérables. L’action en requalification restera un outil essentiel pour sanctionner les abus, mais son application devra tenir compte des nouvelles réalités économiques et sociales.

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